Courrier du Service de Contrôle et d’Evaluation Médicaux de l’I.N.A.M.I PDF Imprimer Envoyer
Écrit par Admin   
Lundi, 04 Avril 2011 14:04

Concerne : courrier du Service de Contrôle et d’Evaluation Médicaux de l’I.N.A.M.I. : mission impossible ?

Cher Membre,

Chère Consœur, Cher Confrère,

Près d’un millier de praticiens de l’art dentaire ont reçu récemment ou vont recevoir un courrier émanant du Service d’Evaluation et de Contrôle Médicaux (I.N.A.M.I.). Ce service est un des organes de gestion de l’Institut d’Assurance Maladie et Invalidité. Depuis la loi du 24 décembre 2002, une des missions de ce service est de détecter des « prestations superflues ou inutilement onéreuses » sur la base des prestations remboursées. Ce même service contrôle également les médecins-conseils présents dans les organismes assureurs. Il y en a donc pour tout le monde.

Le S.E.C.M. procède d’initiative ou à la demande de son comité, ou à la demande dûment motivée du ministre, d’un des services spéciaux de l’I.N.A.M.I, des organismes assureurs ou d’une organisation professionnelle représentée, à toute enquête ou constatation.

Les Clinique dentaire Suisse, la Société de Médecine Dentaire et le Verbond der Vlaamse Tandartsen y sont présentes en tant qu’organisations professionnelles.

En aucun cas, les Clinique dentaire Suisse ne sont à l’origine de l’enquête faisant l’objet du courrier, à savoir la réattestation d’un même soin conservateur – code obturation - dans l’année qui suit une première attestation. Une moyenne a été établie au moyen des données recueillies par les organismes assureurs, moyenne qui s’établit à 8.5 % des soins concernés par l’enquête. Les profils qui dépassent 10 % de réattestation ont été retenus et les prestataires concernés avertis de cette « anomalie » et de leur mise sous monitoring.

Notre organisation ayant accepté de signer l’accord, dont un des termes s’accorde à lutter contre la fraude au sens large, ne peut donc condamner cette initiative sur le fond. En effet, plus de 10% de réattestation d’un même soin dans l’année est interpellant.

Le premier mérite de cette enquête est de quantifier un phénomène que l’on connaît déjà intuitivement. Le second mérite est d’apporter une interprétation, celle du S.E.C.M., qui conclut par la remise en question de la qualité des soins dispensés et une activité inutilement onéreuse pour l’assurance soins de santé dans les cas dépassant les 10 % de réattestation, sur base d’une revue de la littérature.

Même si les études reprises dans la littérature font appel à des méthodologies différentes et mériteraient, comme toute étude scientifique, d’être examinées au niveau des biais, elles constituent certes une base de travail des plus intéressantes.

Il nous semble que la lecture des données recueillies mérite cependant d’autres conclusions, et soulève d’autres interrogations.

Comme dans le cas de la bouteille à moitié vide, ou à moitié pleine, selon la personne qui l’observe, la lecture des données peut être faite dans les deux sens. Un taux d’échec de 8 à 10 % à un an, cela veut dire aussi un taux de réussite de plus de 90 % à un an. Vu la complexité des soins conservateurs et du travail en bouche, cela mérite d’être souligné. La médiane, c'est-à-dire la valeur la plus souvent rencontrée, est à 7.4% , c’est-à-dire que plus de la moitié des prestataires n’atteignent pas ou ne dépassent pas ce taux.

Les données recueillies par le S.E.C.M. ne peuvent techniquement tenir compte :

- des soins réattestés dans la même année pour la même dent chez un autre prestataire de soins.

- d’un soin différent réalisé sur une même dent lors d’une séance ultérieure.

Le taux d’échec moyen relativement élevé des praticiens belges par rapport aux données des études soulève quelques questions :

- Les grands délabrements ou les reconstitutions à risque peuvent justifier l’indication d’extraction. Ce choix raisonnable est cependant difficilement admis par les patients.

Le dentiste belge, sous la pression des patients, n’est-il pas trop conservateur, et ce en particulier pour les dents antérieures, dont les taux de retraitement sont, comme on peut s’y attendre, significativement plus élevés 

- les soins conservateurs traditionnels sont-ils réellement la meilleure indication chez les adultes, dans les cas de délabrement important ? La réponse est intuitivement négative. A l’instar de ce qui se fait dans nombre de nos pays voisins, les grands délabrements dentaires sont des indications de pose de couronne. Mais ce traitement est peu réalisé dans notre pays, parce que non couvert par la sécurité sociale ou par des assurances complémentaires. N’y aurait-il pas lieu dès lors, dans des conditions précises, d’introduire ce type de traitement de base dans la nomenclature ? Sinon, comment le praticien de l’art dentaire peut-il remplir l’obligation de mettre à la disposition des patients tous les moyens nécessaires à son traitement ?

L’étude réalisée par le S.E.C.M. ne met pas en évidence de corrélation nettement significative entre le taux de réattestation et le nombre global de soins réalisés, ni entre le taux de réattestation et la pratique du tiers-payant. Par contre, le taux de réattestation est de 25% plus élevé à Bruxelles-Capitale qu’en province de Luxembourg. Cette différence significative est-elle liée aux patients ou aux praticiens ?

Il est clair que la pratique d’environ 800 praticiens, qui dépassent les 15 % de réattestation, interpelle la majorité d’entre nous. Il faut analyser en profondeur cette cohorte de 800 praticien(ne)s et examiner notamment les variables suivantes et leur corrélation éventuelle avec le problème évoqué :

- l’origine du diplôme : quel pays, quelle université ?

- la répartition géographique des prestataires concernés.

Il est évident qu’un certain taux d’échec doit être admis, d’autant plus élevé que les moyens mis en œuvre ne correspondent pas au meilleur choix dans une situation donnée : la pratique quotidienne nous confirme que des soins conservateurs sur dents très délabrées sans placement d’une couronne sont voués à l’échec à court ou moyen terme, et que l’option thérapeutique primaire doit rester, en l’absence de cette possibilité, l’avulsion de l’organe dentaire trop atteint, surtout si la motivation à l’hygiène n’est pas suffisante.

S’il s’agit par contre d’un déficit régulier de savoir-faire dans le chef du praticien, il faut se poser la question de l’acquisition de ce savoir-faire (lié à l’enseignement universitaire) et du maintien de ce même savoir-faire (lié à de nombreux facteurs tels que l’éthique personnelle, les problèmes organisationnels de gestion du temps, l’aide au fauteuil, les contrôles de qualité interne et externe, la formation continuée…).

Les données recueillies mettent en évidence un prestataire attestant 16000 soins en deux ans. Est-ce compatible avec une qualité de travail satisfaisante ?

Il faut également observer que, bien qu’il n’existe pas, à notre connaissance, une « obligation de résultat », mais bien une « obligation de moyens », une tendance normative s’instaure sournoisement, sous la houlette des organismes assureurs, qu’ils soient publics (I.N.A.M.I.) ou privés (mutualités, assurances D.K.V.), ceci certes pour des raisons d’évaluation de la sinistralité et de contrôle des coûts. La durée de vie des traitements (et, corollairement leur réattestation) sont ainsi aujourd’hui au goût du jour. Les études actuellement disponibles montrent cependant des résultats assez disparates, qui devraient intégrer les caractéristiques locales des pratiques de soins et des demandes des patients.

La mission du S.E.C.M. se révélerait-elle mission impossible ?

Nous ne manquerons pas de faire part de nos remarques au Service de Contrôle et d’Evaluation Médicaux.

Mise à jour le Lundi, 04 Avril 2011 15:32
 

Calendrier

Le mois dernier Octobre 2011 Le mois prochain
L Ma Me J V S D
week 39 1 2
week 40 3 4 5 6 7 8 9
week 41 10 11 12 13 14 15 16
week 42 17 18 19 20 21 22 23
week 43 24 25 26 27 28 29 30
week 44 31

Evènements à venir

Ven Oct 28, 2011 @09:00 - 06:00
Journée scientifique des CSD