La nouvelle procédure fiscale vient d'entrer en vigueur
Avantage au contribuable ou au fisc?
Elle était en chantier depuis plusieurs années, elle a fait l'objet de plusieurs projets de loi, parfois abandonnés suite aux avis dévastateurs du Conseil d'État et des analystes, elle est réapparue plusieurs fois sous des formes toujours plus limitées et elle a enfin été adoptée par le Parlement par la loi du 15 mars 1999 relative au contentieux fiscal et du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale. Elle a été publiée au Moniteur du 27 mars 1999. Elle, c'est la nouvelle procédure fiscale ou, pour être plus précis, la procédure qui sera appliquée en cas de contentieux en matière fiscale, que ce contentieux soit réglé par voie administrative ou par voie judiciaire. La réforme est-elle favorable ou défavorable au contribuable ? Difficile à dire. Par rapport aux projets initiaux concoctés par le Gouvernement, il semble en tout cas que la situation des contribuables s'est améliorée (intervention claire du pouvoir judiciaire, délais...). Dommage toutefois qu'on n'ait pas profité de la réforme pour introduire dans la législation fiscale quelques modifications vraiment radicales. Elle était en chantier depuis plusieurs années, elle a fait l'objet de plusieurs projets de loi, parfois abandonnés suite aux avis dévastateurs du Conseil d'État et des analystes, elle est réapparue plusieurs fois sous des formes toujours plus limitées et elle a enfin été adoptée par le Parlement par la loi du 15 mars 1999 relative au contentieux fiscal et du 23 mars 1999 relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale. Elle a été publiée au Moniteur du 27 mars 1999. Elle, c'est la nouvelle procédure fiscale ou, pour être plus précis, la procédure qui sera appliquée en cas de contentieux en matière fiscale, que ce contentieux soit réglé par voie administrative ou par voie judiciaire. C'est en matière d'impôts sur les revenus que la réforme est le plus révolutionnaire. C'est à cette matière qu'est consacré cet article. Situation ancienne : réclamation et ensuite, Cour d'appel Dans l'ancienne procédure, le redevable de l'impôt pouvait se pourvoir en réclamation, par écrit, contre le montant de l'imposition établi à sa charge, auprès du directeur des contributions. La réclamation devait être motivée et présentée, sous peine de déchéance, au plus tard le 30 avril de l'année qui suivait celle au cours de laquelle l'impôt était établi. Cependant ce délai ne pouvait être inférieur à six mois à partir de la date de l'avertissement-extrait de rôle. Le délai de réclamation était donc de six mois au minimum et pouvait même être bien plus long. C'était en tout cas confortable pour le contribuable. Tant que le directeur des contributions n'avait pas statué, le redevable pouvait compléter sa réclamation initiale par des griefs nouveaux. On remarquera qu'aucun délai n'était fixé pour la décision du directeur des contributions. De même, la nature de sa décision (judiciaire ou administrative) n'a jamais cessé d'empoisonner les relations entre le contribuable et le fisc : comment imaginer en effet que lorsqu'il statuait sur la réclamation, le directeur des contributions devenait soudain impartial comme doit l'être un juge, oubliant de quelle administration il relevait et quelles circulaires celle-ci avait éditées. En cas de décision décevante, le redevable pouvait alors soumettre celle-ci à la Cour d'appel dans les quarante jours. Dans ce cadre, des griefs qui n'avaient été formulés ni dans la réclamation ni examinés d'office pouvaient être invoqués, pour autant qu'ils touchent une contravention à la loi ou une violation de forme de procédure prescrite à peine de nullité. Les recours devant la Cour d'appel étaient généralement coûteux, lents (plusieurs années) et privaient en toute hypothèse le redevable de l'impôt d'un premier degré d'instance (le tribunal de 1ère instance). Enfin, l'arrêt de la Cour d'appel pouvait faire l'objet d'un pourvoi en cassation. Objectif de la Réforme : justice et accélération de la procédure La réforme de la procédure judiciaire répond à plusieurs objectifs mais on peut souligner les suivants. Après que le caractère juridictionnel de la décision du directeur des contributions ait été clairement rejeté et dans un souci d'accélérer la procédure en matière fiscale, le législateur a scindé la procédure en une phase administrative et une phase judiciaire. Voici donc le résultat de ces longues palabres. Situation nouvelle : phase administrative d'abord… Dorénavant, le Code des impôts sur les revenus contient une section intitulée "recours administratif". Comme auparavant le redevable peut introduire une réclamation contre le montant de l'imposition, auprès du directeur des contributions. Cette faculté est également ouverte au conjoint sur les biens duquel l'imposition est mise en recouvrement. Le premier changement important concerne le délai d'introduction de la réclamation : celle-ci doit être introduite dans un délai de trois mois à partir de l'envoi de l'avertissement-extrait de rôle. Il s'agit d'une réduction drastique du temps laissé au contribuable pour contester une imposition. Second changement: le code précise dorénavant que le directeur des contributions statue en tant qu'autorité administrative. Fini donc la double casquette de ces hauts fonctionnaires. Quand ils se prononcent, ils le font dorénavant en tant que représentants de l'Administration fiscale. Voilà au moins qui est clair. Phase judiciaire ensuite Troisième changement important : les tribunaux de 1ère instance connaîtront dorénavant, au premier stade, les contestations relatives à l'application d'une loi d'impôt. Il s'agit d'une modification fondamentale puisque, jusque-là, en matière d'impôts sur les revenus, seule la Cour d'appel connaissait des litiges fiscaux. On notera également que le recours judiciaire n'est ouvert que si le redevable a préalablement introduit le recours administratif dont il a été question ci-dessus. Les auteurs de la réforme parlent de filtre visant à éviter un encombrement inutile des tribunaux de l'Ordre judiciaire. L'avenir nous dira si ce n'est pas un détour obligé se traduisant par une perte de temps pour le contribuable. Le quatrième changement est toutefois de nature à tempérer cette dernière remarque. Si le directeur des contributions n'a pris aucune décision six mois après la date de réception du recours administratif, le redevable de l'impôt peut alors introduire un recours judiciaire. Ce délai de six mois est prolongé de trois mois lorsque l'imposition contestée a été établie d'office par l'Administration. Cela permettra à l'avenir d'éviter que l'Administration fiscale, via ses directeurs des contributions, ne fasse traîner des réclamations qui l'obligeraient, sans doute, à trancher en sa défaveur des questions de droit fiscal! En cas de décision du directeur, le contribuable a trois mois pour introduire son recours judiciaire. Le recours devant la Cour d'appel et le pourvoi en cassation sont bien sûr toujours possibles. Entrée en vigueur Les règles d'entrée en vigueur des lois du 15 mars relative au contentieux fiscal et du 23 mars relative à l'organisation judiciaire en matière fiscale sont à ce point complexes qu'elles mériteraient à elles seules un article. Retenons principalement que les règles relatives à la procédure administrative produisent pour la plupart leurs effets à partir de l'exercice d'imposition 1999 - revenus 1998. Quant à la réforme de la procédure judiciaire en matière fiscale, on retiendra en particulier que les procédures actuellement pendantes devant les cours, tribunaux et autres instances, y compris les voies de recours qui peuvent être introduites contre leurs décisions, seront poursuivies et clôturées conformément aux règles en vigueur avant le 1er mars 1999. En outre, la possibilité d'introduire une action judiciaire en cas d'absence de décision du directeur des contributions n'est pas applicable lorsque le recours porte sur l'imposition afférente à l'exercice d'imposition 1998 (revenus 1997) ou à un exercice antérieur en ce qui concerne les impôts sur les revenus. Cette règle ne vaut pas pour les réclamations toujours pendantes à l'Administration et qui n'ont fait l'objet d'aucune décision au 31 mars 2001. Conclusion La réforme est-elle favorable ou défavorable au contribuable? Difficile à dire. Par rapport aux projets initiaux concoctés par le Gouvernement, il semble en tout cas que la situation des contribuables s'est améliorée (intervention claire du pouvoir judiciaire, délais...). Dommage toutefois qu'on n'ait pas profité de la réforme pour introduire dans la législation fiscale quelques modifications vraiment radicales. Ainsi, on aurait pu (dû?) considérer que l'absence de décision du directeur des contributions équivalait à une décision favorable au contribuable qui introduit la réclamation. De même, certains délais d'imposition auraient pu être réduits (par exemple, en ce qui concerne des éléments directement contrôlables sur base de la déclaration fiscale). Tout au long de ces années de travaux préparatoires, l'UCM est demeurée attentive à l'évolution du projet de réforme de la procédure fiscale. Elle est intervenue fréquemment auprès des ministres des Finances successifs et des parlementaires en faisant connaître son point de vue, en proposant des alternatives ou des amendements aux textes. Il semble que cela n'ait pas été inutile… Le manque flagrant de juges spécialisés en matière fiscale laisse cependant mal augurer de la mise en pratique de la nouvelle procédure. Il faudra faire vite, sous peine d'assister à un engorgement des tribunaux... Source: Union & Actions |
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